Face à l’évolution des habitudes de consommation et à une attention croissante portée à la santé, les vins désalcoolisés se font progressivement une place dans le paysage viticole. Si leur développement reste encore limité en France, il suscite l’intérêt des professionnels et soulève des enjeux techniques, réglementaires et culturels, indique l’Institut Français de la vigne et du vin (IFV) dans un document publié le 31 juillet 2024.
Un vin désalcoolisé est un produit vinifié de manière classique, mais dont l’alcool a ensuite été partiellement ou totalement retiré. Selon l’IFV, « un vin désalcoolisé contient moins de 0,5 % d’alcool par volume, tandis qu’un vin partiellement désalcoolisé peut atteindre jusqu’à 9 % d’alcool ». Ces produits se différencient des boissons aromatisées ou des jus de raisin par leur procédé de fabrication, qui leur permet de conserver l’identité du vin.
Cette catégorie de produits répond à une demande croissante des consommateurs, qui souhaitent limiter leur consommation d’alcool tout en continuant à profiter de l’expérience gustative qu’offre le vin. « Les nouvelles générations, en particulier, sont en quête d’alternatives à faible ou sans alcool, adaptées à un mode de vie plus sain », explique l’IFV.
Produire un vin désalcoolisé représente un défi technique important. L’alcool joue un rôle majeur dans l’équilibre des saveurs et la structure d’un vin. Son retrait peut altérer le produit final, à moins d’utiliser des procédés adaptés.
Parmi les techniques disponibles, l’IFV cite la distillation sous vide, la filtration membranaire ou encore l’évaporation sous pression réduite. « Ces procédés permettent d’extraire l’alcool tout en préservant au maximum les qualités organoleptiques du vin », indique l’IFV, tout en soulignant que chacun de ces procédés a ses avantages et ses limites, notamment en termes de coût et d’efficacité.
En France, la consommation de vins désalcoolisés reste marginale : ces produits représentent moins de 1 % des ventes totales de vin, selon l’IFV. Cependant, à l’échelle mondiale, le marché des boissons sans alcool ou à faible teneur en alcool connaît une croissance rapide, particulièrement en Allemagne, aux États-Unis et au Royaume-Uni.
Cette tendance ne touche pas uniquement les personnes qui ne boivent pas d’alcool. Elle séduit aussi une clientèle plus large, qui cherche à modérer sa consommation, notamment pour des raisons de santé, ou qui souhaite prolonger une expérience de dégustation sans ressentir les effets de l’alcool. « Les vins désalcoolisés constituent une nouvelle alternative pour les consommateurs en quête de modération », souligne l’IFV.
Malgré cette évolution, des obstacles subsistent. En France, la réglementation ne permet pas aux vins désalcoolisés de porter la dénomination « vin », qui est réservée aux boissons contenant au moins 8,5 % d’alcool. Ces produits doivent donc être commercialisés sous des appellations telles que « boisson à base de vin », ce qui peut compliquer leur positionnement auprès des consommateurs.
D’un point de vue culturel, ces produits interrogent également la perception du vin en France. « L’alcool fait partie intégrante de l’identité du vin dans l’imaginaire collectif français », rappelle l’IFV. Certains considèrent qu’un vin sans alcool perd une partie de son essence.
Malgré ces freins, les vins désalcoolisés offrent des perspectives intéressantes pour la filière viticole. « Ils permettent d’explorer de nouveaux segments de marché et de répondre aux attentes d’une clientèle diversifiée », estime l’IFV. Ces produits peuvent aussi constituer une porte d’entrée vers le vin pour des consommateurs moins familiers avec cette boisson.
Pour concrétiser ce potentiel, l’IFV insiste sur la nécessité d’investir dans la recherche pour améliorer les procédés de désalcoolisation et garantir une qualité sensorielle irréprochable. Par ailleurs, une meilleure communication sur ces produits est essentielle pour surmonter les réticences des consommateurs.
« Si la qualité est au rendez-vous, les vins désalcoolisés pourraient devenir une véritable opportunité pour la viticulture française », indique l’IFV.