Si le semis de précision permet d’obtenir une levée plus régulière et plus homogène, donc un colza plus robuste à l’automne, l’implantation avec un semoir à céréales gêne davantage la levée des adventices et sera mieux adapté à un semis avec plantes compagnes.
« Chez moi, le choix de semis avec un semoir monograine ou un semoir classique à céréales va dépendre avant tout des conditions pédoclimatiques de l’année, explique Anthony Frison, agriculteur à Boynes dans le Loiret, et agronome chez AgroLeague. En terrain superficiel, si les conditions sont sèches, je vais retenir le semoir à céréales, pour obtenir une couverture en colza plus serrée et mieux gérer le désherbage. Si comme cette année, le sol est humide, je passerai au semoir monograine. Je n’ai cependant pas noté de différences de rendement entre les deux types de semis. Je n’ai pas fait d’expérimentation à proprement parler sur le sujet, c’est davantage un ressenti après plusieurs années d’expérience. » L’agriculteur du Loiret a semé, cette année, ses 29 ha de colza, entre le 10 et le 12 août, après du blé dur, avec un semoir Monosem NG-4 à disques.
« J’ai broyé la paille et dégagé la ligne de semis sur 10-15 cm avec un chasse-débris flottant Martin-till importé des Etats-Unis, dix jours avant le semis », précise l’agriculteur qui est équipé d’un système GPS RTK. « Et, aujourd’hui, un mois après le semis, le colza se porte à merveille. Les pivots sont correctement placés, bien implantés, n’ont cessé de se développer et ont bien ramifié. Je crois que le colza est suffisamment robuste pour résister aux éventuelles attaques d’altises. L’idée avec le semis de précision est aussi de réduire la quantité de graines. En descendant à une densité de 18-20 grains/m2, j’ai divisé par deux le coût des semences et l’ai ramené à entre 15 et 20 €/ha. Une sécurité parce qu’avec le colza, on ne sait jamais si pour une raison ou pour une autre, on ne va pas être obligé de retourner la parcelle. »
« Le monograine contribue à un meilleur positionnement et rappui de la graine, avec des levées à la fois plus rapides, plus vigoureuses et plus homogènes qu’avec un semoir à céréales », reconnaît Terres Inovia. Des essais conduits par l’institut technique, il y a quelques années, ont mis en évidence un gain de rendement avec le semis de précision. Dans son essai de Morville sur Seille en Meurthe-et-Moselle à l’automne 2012, par exemple, les colzas semés au semoir monograine avaient atteint le stade cotylédons – 1ère feuille alors que ceux semés au semoir à céréales étaient encore en cours de levée. Le peuplement est plus régulier avec le semoir monograine et un gain de rendement de 2,3 q/ha a été constaté.
Comme le souligne Terres Inovia, l’espacement régulier des graines sur la ligne optimise les capacités de compensation de la plante. Ce type de semis présente aussi l’avantage de rendre possible le binage de la culture grâce à un espacement plus large entre les rangs.
L’institut technique prévient cependant de quelques précautions à prendre avec un semoir de précision. Il conseille notamment de ne pas dépasser 50 cm d’écartement en sols superficiels, de réserver les écartements type maïs, jusqu’à 80 cm, aux sols profonds, à forte disponibilité en eau et en azote, et de se limiter à 15 plantes par mètre linéaire maximum, pour éviter la concurrence entre plantes. L’optimum, en sols moyens et profonds, est d’opter pour un écartement de 45-50 cm.
« Si le principal avantage du semis de précision est d’améliorer la vigueur au départ, et ainsi de minimiser les risques de dégâts de limaces ou d’altises par la suite, en revanche, le débit de chantier est faible, 5-7 km/h, et la largeur de semis moins grande, rappelle Terres Inovia. Un paramètre qui a son importance quand les surfaces à semer sont importantes. A une vitesse de 10 à 15 km/h, les semoirs à céréales restent plus rapides. »
L’institut technique remarque aussi qu’un écartement plus important entre les rangs a tendance à favoriser le développement des adventices. Il est enfin moins facile d’implanter du colza avec des plantes compagnes avec un semoir monograine qu’avec un semoir classique à céréales, même si des solutions existent, en utilisant le micro-granulateur par exemple.